Conseil de Défense de la Révolution Tunisienne

(Projet de plateforme présenté à la réunion du 14 janvier 2012) (*)

[Préambule]

Commencée en décembre 2010, la révolution tunisienne a provoqué un changement radical : d’une part, chute du dictateur et ébranlement des assises de son régime et, d’autre part, mise en place de nouvelles instances qui ont conduit à l’organisation de l’élection libre d’une Assemblée constituante. Ce sont là des acquis certains, mais l’essentiel reste à faire : conquérir une véritable indépendance nationale, consolider le processus démocratique, réaliser la justice sociale, etc. A cet égard, le Conseil de Défense de la Révolution Tunisienne se veut une instance indépendante qui vise à apporter sa propre contribution à la réalisation de ces objectifs, en tenant compte notamment des attentes des Tunisiennes et Tunisiens vivant à l’étranger.

 

[Etats des lieux]

Pour mieux définir les objectifs du Conseil, il convient de rappeler certains aspects de l’actuelle période de transition qui posent problème :

L’indépendance nationale de la Tunisie est loin d’être réelle. Elle est en effet entravée par la présence de bases militaires étrangères ; par une économie libérale dépendante des délocalisations et des succursales d’entreprises ou de banques étrangères ; par une dette odieuse ; par un développement orienté principalement vers les secteurs d’exportation et les services du tourisme (vacancier, médical, archéologique, sexuel…) ; par une politique étrangère largement soumise aux agendas des Etats-Unis et de l’Europe.

La démocratie, elle, n’est qu’à ses débuts. Elle est menacée par des forces contre-révolutionnaires, un lourd appareil répressif encore en place (notamment la police et le ministère de l’intérieur), une justice corrompue et longtemps aux ordres, des hauts cadres de l’administration qui doivent tout à l’ancien régime, les manœuvres des groupes d’intérêts liés aux puissances étrangères et tous ceux qui veulent réduire la démocratie à son aspect représentatif, sous-estimant la nécessaire participation directe des citoyens dans la conduite des affaires du pays.

La justice sociale est pratiquement inexistante. Les manifestations en sont connues : accaparement des richesses par une petite minorité de privilégiés aux dépens d’une majorité frappée par la pauvreté, la précarité et le chômage, inégalités flagrantes entre les régions et entre le monde rural et urbain, enseignement et soins de santé de qualité réservés aux plus riches, etc.

La situation des Tunisiennes et Tunisiens vivant à l’étranger porte aussi les stigmates des méfaits de la dictature déchue : fuite des cerveaux ; croissement de la masse des sans-papiers subissant l’exploitation sur le marché du travail en noir ; déracinement ; rupture avec la langue et la culture du pays ; services consulaires largement insuffisants, clientélisme, harcèlement policier, exclusion de toute participation citoyenne authentique aux affaires du pays, conditions d’accueil insatisfaisantes à l’occasion des visites au pays, absence de représentation pour défendre leurs droits citoyens aussi bien dans le pays d’origine que dans le pays d’accueil, etc.

 

[Objectifs]

En partant des constats relevés, le Conseil se fixe pour objectifs d’œuvrer à la conquête d’une indépendance nationale effective, (notamment en matière de soutien à la résistance du peuple palestinien et aux aspirations à la démocratie et à l’unité du monde arabe), à la consolidation d’une véritable démocratie et à la promotion résolue de la justice sociale.

Dans la définition de ses objectifs, le Conseil accorde une attention particulière à la situation des Tunisiennes et Tunisiens vivant à l’étranger en tenant compte d’une double exigence : en tant qu’acteurs, les Tunisiennes et Tunisiens veulent participer à la définition du modèle de société de leur pays d’origine et, en tant que citoyens vivant à l’étranger, ils veulent que leurs revendications et droits soient rencontrés.

En conséquence, les Tunisiennes et Tunisiens aspirent à contribuer à la réalisation de ces objectifs en s’impliquant directement de plusieurs manières :

§  avoir une instance représentative leur permettant de faire valoir leurs droits citoyens et leurs intérêts tant à l’étranger qu’en Tunisie ;

§  formuler des propositions aussi bien spécifiques, en tant que citoyens tunisiens vivant à l’étranger, que générales relatives à l’évolution de la société tunisienne ;

§  se préoccuper des orientations en matière de politique étrangère, notamment le rejet de toute normalisation avec l’Etat sioniste ;

§  veiller à ce que les institutions à l’étranger (corps diplomatique et autres) soient vraiment au service des citoyens tunisiens.

Partant de là, le Conseil veillera aussi à ce que ses initiatives (propositions, actions…) soient réellement prises en compte. 

 

[Organisation et fonctionnement]

Le Conseil est ouvert à toutes les personnes (sans distinction de nationalité ou d’option philosophique), associations ou partis qui adhèrent à cette plateforme, s’engagent à en respecter les règles de fonctionnement, la soutiennent matériellement et participent d’une manière ou d’une autre à ses activités.

Afin de s’assurer de la collégialité des décisions et d’un minimum d’efficacité, le Conseil comptera sur trois instances : une Assemblée générale souveraine (pour les grandes orientations et le plan d’activités), un Comité de suivi restreint (pour la mise en œuvre des décisions de l’Assemblée générale) et des commissions permanentes ou occasionnelles (pour assister le Comité de suivi dans ses tâches). Des règles de fonctionnement plus détaillées sont jointes à cette plateforme et en font partie intégrante.

Pour son financement, le Conseil disposera d’une large autonomie et, de ce fait, comptera principalement sur ses propres ressources, mais il peut accepter tout soutien extérieur inconditionné, matériel ou subside.

Dans le cadre de ses activités, le Conseil utilisera tous les moyens légaux du pays d’accueil à sa disposition pour faire valoir ses droits. Pour la réalisation de ses objectifs, le Conseil adopte une attitude de collaboration avec toutes les personnes, associations ou institutions qui partagent ses principes, valeurs et démarches, en Europe comme en Tunisie.

 

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Notes

 

(*) Ce projet a été écrit en collaboration avec un autre membre du Conseil. Il devait servir de base à l’actualisation de la précédente plateforme.

Le débat sur la plateforme a abouti à de nombreux amendements. Voici les plus significatifs :

1) Dans le paragraphe sur l’indépendance nationale, la formule « existence de bases militaires » a été remplacée par « cadre de coopération militaire » et « économie libérale dépendante... » par « économie dépendante ».

2) dans le paragraphe sur le fonctionnement, le principe du consensus dans la prise de décision dans toutes les instances du Conseil a été assoupli. Visant à éviter les blocages éventuels en cas de divergences, le principe du consensus est maintenu pour l’Assemblée générale, mais pas pour le comité de suivi. Pour ce dernier, en cas de blocage, il serait fait appel à un « groupe de médiation » avant la convocation d’une assemblée générale.

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